13-01-2016

Remi Parcollet

La photographie permet-elle de réinventer les récits de l'histoire de l'art ? Il s’agit de revenir sur la place du document dans un processus d’accrochage, en particulier celle des photographies de vues d’expositions. Car aujourd’hui, curieusement, ces images d’expositions s’exposent à leur tour. Ces archives visuelles sont souvent utilisées pour appuyer et prouver par l’image la qualité de remise en espace d’une proposition curatoriale devenue historique. Ce phénomène est lié à l’essor de l’histoire des expositions, tel que ce domaine d’études s’affirme aujourd’hui, au croisement de la programmation institutionnelle et de la recherche scientifique. L’histoire de l’art s’écrit souvent sur les cimaises des musées. Le « photomural » apparaît comme exemplaire de l’ambivalence du statut de la photographie, qui oscille entre médiation scénographique, document et œuvre. C’est dans ce contexte qu’il faut analyser l’usage actuel des vues d’exposition dont l’échelle, souvent immersive, amplifie l’effet de mise en abyme. La vue d’exposition se compose souvent autour d’une ouverture, fréquemment exploitée par les curateurs pour créer des vis-à-vis entre les salles et constituer une continuité dans l’accrochage. Tout comme les photographes ils exploitent cette découpe de l’espace pour construire l’accrochage, le display. La relation de ces vues d’exposition agrandies avec les œuvres sera inévitablement documentée à son tour. Les perspectives de ces deux espaces seront coordonnées, tout comme le propos curatorial et le regard documentaire. Conceptualiser le « devenir image » de l’exposition permet non seulement de la penser, d’écrire son histoire, mais contribue aussi à la concevoir, à la créer. Qu’il soit assumé par un scénographe, un scientifique, un conservateur ou un historien, un artiste ou encore par un commissaire d’exposition ou un curateur, le discours impliqué par cette pratique n’est pas similaire. Remi Parcollet est historien de l’art contemporain. Il travaille sur l’histoire des expositions, à partir d’approches contemporaines des archives visuelles, du patrimoine et des humanités numériques, du traitement des images dans l’histoire des musées et des témoignages visuels dans le champ artistique et culturel.